Le 13 juillet 2023, une manifestation a été organisée devant la Cour d’appel de Tunis pour appeler à l’indépendance d’une justice que Kaïes Saïed instrumentalise afin de neutraliser ses opposants et ses détracteurs et pour réclamer la libération des détenus politiques emprisonnés depuis cinq mois. Le même jour, Chaïma Issa, militante du Front du salut et première prisonnière politique après la révolution, et Lazhar Akremi, critique courageux des décisions autoritaires de K. Saïed ont été libérés. Mais cette mise en liberté s’accompagne d’une interdiction de voyager et d’apparaître publiquement aux fins, fort vraisemblablement, de les empêcher de témoigner du caractère mensonger du dossier relatif au “complot contre la sûreté de l’État”.
A sa sortie de prison, Chaïma Issa a fait une déclaration, véritable appel urgent au peuple tunisien, en particulier à ses forces vives. Elle en appelle :
– au rejet de la haine et du désir primaire de vengeance, de la propagation de la division et de la division, c’est-à-dire de tout ce sur quoi repose le discours populiste présidentiel que K. Saïed tente d’enraciner dans la société tunisienne afin de se maintenir son pouvoir.
– à l’unité des forces civiles et politiques afin d’obtenir la libération des prisonniers politiques qui n’ont fait que s’opposer aux mesures anti-démocratiques de K. Saïed et exiger le rétablissement de la voie démocratique interrompue depuis le 25 juillet 2021.
Elle considère que K. Saïed a non seulement dévoyé le cours démocratique et aggravé la crise politique, mais aussi accentué la crise économique et sociale aiguë qui menace aujourd’hui la population au quotidien en raison d’une inflation d’une ampleur jamais connue jusqu’alors et des pénuries de matières premières qui paralysent nombre de secteurs économiques.
Chaïma Issa a également évoqué la crise morale que traverse le pays faisant référence à l’attitude honteuse des autorités envers les immigrés africains, le positionnement officiel n’ayant rien à envier à la rhétorique de l’extrême droite quand il évoque le « complot pour modifier la composition démographique de la Tunisie et tenter de changer son identité arabo-islamique ».
Violenter des immigrés, s’en prendre à leurs biens, les repousser dans le désert sans nourriture ni abri constituent ni plus ni moins des crimes contre l’humanité.
L’évocation de son expérience carcérale a également été l’occasion de parler des injustices dont sontvictimes les femmes détenues de droit commun, que ce soit au regard des peines sévères et parfois injustes ou des mauvais traitements et le non-respect de leur dignité et de leurs droits.
Enfin, elle a exprimé sa reconnaissance et sa gratitude envers le Comité de défense qui « l’a délivrée du monstre carcéral » et l’a défendue avant et pendant son arrestation.
Le CRLDHT soutient la position de l’activiste Chaïma dans la nécessité de mobiliser toutes les forces en vuede libérer tous les prisonniers politiques. Il exprime à son tour sa grande reconnaissance au Comité dedéfense des prisonniers politiques, qui démontre leur innocence et a révélé la vacuité du dossierd’accusation, ses étranges contradictions et les nombreuses transgressions qui ont accompagné l’arrestation et l’emprisonnement , autant de positions courageuses et honorables que l’histoire retiendra.