Depuis l’élection de Kais Saied comme président de la République en 2019, les droits des femmes en Tunisie ont connu un recul alarmant. Plusieurs organisations de défense des droits des femmes ont exprimé leurs inquiétudes face à l’érosion progressive des acquis obtenus depuis la révolution de 2011.
Augmentation des Violences et du Harcèlement
Les violences contre les femmes, y compris les meurtres et les agressions, ont augmenté de manière alarmante. Les statistiques montrent une hausse des cas de féminicides et de violences domestiques, avec un système judiciaire souvent impuissant ou réticent à protéger les victimes. Les militantes des droits des femmes sont souvent ciblées par des campagnes de diffamation et de harcèlement en ligne, exacerbant leur vulnérabilité. Des témoignages récents révèlent que les forces de l’ordre, au lieu de protéger, participent parfois à ces actes de violence et de harcèlement, comme le montre l’affaire de Samia Ben Hassine, une activiste arrêtée et maltraitée pour son engagement public.
Arrestations et Répressions Politiques
Depuis le coup du 25 juillet 2021 et la promulgation du décret-loi 54 le 13 septembre 2022, de nombreuses femmes ont été poursuivies, arrêtées et emprisonnées pour leur engagement public et politique. Ces détentions sont souvent arbitraires et basées sur des accusations infondées, des publications sur les réseaux sociaux ou des déclarations. Des organisations de la société civile ont dénoncé cette répression, soulignant l’absence de justice pour les femmes activistes et la brutalité des conditions de détention. La campagne “Liberté pour toutes les femmes sans exception”, lancée par la dynamique féministe indépendante, vise à libérer toutes les femmes emprisonnées en raison de leur activité militante, politique ou de leur opinion et à mettre fin aux poursuites judiciaires arbitraires.
Discours de Haine et Divisions Sociales
Le discours de haine et les divisions sociales ont été exacerbés sous le régime de Saied, divisant la société tunisienne et créant un climat de peur et d’insécurité pour les femmes. Les activistes et les défenseurs des droits humains ont été particulièrement visés, rendant leur travail encore plus difficile et dangereux. La polarisation politique et la stigmatisation des voix dissidentes ont contribué à isoler les militantes, les exposant à des attaques incessantes sur les réseaux sociaux, dans les médias et même les cours de justice.
Régression Législative et Institutionnelle
Les réformes législatives et institutionnelles entreprises sous Kais Saied ont souvent ignoré ou même sapé les droits des femmes. La fermeture des institutions indépendantes et la centralisation du pouvoir ont affaibli les mécanismes de protection des droits humains. Les modifications apportées à la Constitution et la dissolution de l’Assemblée des représentants du peuple ont laissé les défenseurs des droits des femmes sans recours institutionnel efficace. La loi électorale en est un exemple frappant. Instaurée par le président Kais Saied, elle a provoqué une réaction intense parmi les défenseurs des droits des femmes. Critiquée pour réduire la participation féminine dans le processus politique, cette loi a supprimé le principe de discrimination positive en faveur des femmes et des jeunes. Les associations féministes dénoncent cette régression, soulignant l’incompatibilité de la loi avec les garanties constitutionnelles d’égalité des sexes. La suppression du financement public des campagnes électorales et la complexité des circonscriptions électorales sont également pointées du doigt comme des freins à la participation des femmes dans la vie politique.
Mobilisation et Résistance
Face à ces défis, les groupes de défense des droits des femmes ont intensifié leurs efforts de mobilisation. La campagne “Liberté pour toutes les femmes sans exception”, lancée par la Dynamique Féministe, vise à libérer toutes les femmes emprisonnées en raison de leurs activités dans l’espace public et à mettre fin aux poursuites judiciaires arbitraires. Cette campagne culminera avec une manifestation prévue pour le 13 août 2024, devant le théâtre municipal de Tunis, en protestation contre les violations continues des droits des femmes.
Le CRLDHT se joint à cet appel à la solidarité et à la mobilisation pour la défense des droits des femmes en Tunisie et la libération de toutes les détenues politiques et d’opinion, exhortant les autorités à respecter et à protéger les droits fondamentaux de toutes les citoyennes. Nous rappelons que la lutte pour l’égalité et la justice est essentielle pour le progrès de toute société, et que chaque recul dans les droits des femmes est une menace pour la démocratie et la paix sociale.