La déclaration d’Abir Moussi : un retrait d’une justice qu’elle dénonce comme illégitime

Le 30 janvier 2025, Abir Moussi, figure de l’opposition en Tunisie et présidente du Parti destourien libre (PDL), a publié une déclaration dans laquelle elle annonce son retrait de toutes les procédures judiciaires la concernant. Dans ce document, elle dénonce une justice inféodée au pouvoir exécutif et affirme qu’elle est victime d’une campagne de persécution politique.

Un rejet des procédures judiciaires actuelles

Abir Moussi déclare qu’elle ne reconnaît plus la légitimité des procès auxquels elle est soumise, arguant que l’appareil judiciaire tunisien fonctionne hors du cadre constitutionnel. Elle cite plusieurs raisons à cet égard : l’absence d’une cour constitutionnelle pour contrôler les textes en vigueur, la caducité des décrets pris durant la période d’exception et la soumission des juges au pouvoir exécutif. Cette situation, selon elle, viole les principes fondamentaux du droit à un procès équitable consacrés par les conventions internationales.

Les décrets et lois contestés

Elle remet particulièrement en cause le décret-loi n°54 de 2022 sur les crimes liés aux technologies de l’information et de la communication. Selon Moussi, ce texte, qu’elle qualifie d’anticonstitutionnel, sert de base à des accusations injustes et arbitraires, contraires aux droits fondamentaux à la liberté d’expression et de réunion.

Conséquences de son retrait des procédures

Abir Moussi prévient qu’elle ne reconnaîtra aucune décision judiciaire prise contre elle, présente ou future. Elle annonce son intention de contester juridiquement les mesures qui porteront atteinte à ses droits civils et politiques, tout en préparant des recours internationaux après avoir épuisé les voies de recours internes.

Dans ce contexte, Moussi demande à ses avocats de se retirer de toutes les affaires la concernant et de refuser toute désignation d’office. Elle sollicite également l’intervention des organisations nationales et internationales de défense des droits humains pour dénoncer les pressions et violations qu’elle subit, notamment l’interdiction de visites de sa fille et le blocage de ses activités essentielles.

Elle annonce qu’elle continuera de plaider sa cause devant les instances internationales pour obtenir justice. Pour elle, les procès en cours ne sont qu’une nouvelle tentative du pouvoir actuel de réduire au silence les figures de l’opposition.

Abir Moussi fait face à plusieurs poursuites judiciaires, certaines en cours et d’autres ayant conduit à des condamnations.

  • Affaire relative à la tentative de recours contre les décrets présidentiels (octobre 2023): Chef d’accusation principal : tentative de changement de la forme du gouvernement et incitation à la violence sur le territoire tunisien, en vertu de l’article 72 du Code pénal (infraction passible de la peine de mort).Arrêtée le 3 octobre 2023 alors qu’elle tentait de déposer un recours contre des décrets présidentiels relatifs aux prochaines élections locales, elle est accusée d’avoir perturbé l’ordre public et provoqué des troubles à travers ses actions et déclarations. Elle est depuis en détention provisoire.
  • Affaire relative à l’utilisation abusive des données personnelles : chef d’accusation : Traitement de données personnelles sans le consentement de leurs titulaires, en vertu des articles 27 et 87 de la loi sur la protection des données. Cette affaire s’inscrit dans le cadre d’allégations selon lesquelles Moussi aurait utilisé des informations privées dans le cadre de ses actions politiques.
  • Affaire pour entrave au bon déroulement du travail : chef d’accusation : interférence avec la liberté de travail (article 87 de la loi sur la protection des données). Ces accusations concernent des manifestations organisées par Moussi et ses partisans devant des institutions publiques.
  • Affaires ayant conduit à une condamnation de deux ans de prison. Motif critique publique du processus électoral organisé sous l’égide du président Kaïs Saïed. Condamnation en vertu du décret-loi n°54 de 2022, notamment l’article 24 relatif à la diffusion de fausses informations pouvant nuire à l’ordre public. Abir Moussi a publiquement dénoncé l’absence de transparence dans les élections et appelé à des réformes institutionnelles, ce qui a été interprété comme une tentative de déstabilisation.

La déclaration d’Abir Moussi met en lumière la dégradation des institutions judiciaires et la crise profonde que traverse la Tunisie en matière de respect des libertés fondamentales.

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