Chadha Haj Mbarek ou comment le pouvoir s’en prend à la liberté d’expression

La journaliste Chadha Haj Mbarek a été arrêtée début octobre 2021 dans le cadre de l'affaire dite de la « société Instalingo ».  Elle a été accusée de complot contre la sûreté de l’Etat, d’atteinte à l’ordre public et d’outrage au président de la République, autant d’accusations frappant de nombreux activistes auxquelles le pouvoir actuel a recours depuis le 25 juillet 2021, date de l’imposition de l’état d’exception par Kaïs Saied.

La journaliste Chadha Haj Mbarek a été arrêtée début octobre 2021 dans le cadre de l’affaire dite de la « société Instalingo ».  Elle a été accusée de complot contre la sûreté de l’Etat, d’atteinte à l’ordre public et d’outrage au président de la République, autant d’accusations frappant de nombreux activistes auxquelles le pouvoir actuel a recours depuis le 25 juillet 2021, date de l’imposition de l’état d’exception par Kaïs Saied.

Sa famille a été maltraitée, son père et ses deux frères arrêtés puis relâchés, puis le juge d’instruction a décidé de la libérer également et d’abandonner les charges retenues contre elle au cours de l’été dernier. Le ministère public décide alors de faire appel et procède, à trois reprises, à la nomination d’un juge d’instruction faisant en sorte qu’elle reste en détention.

Les avocats et le Syndicat des journalistes se sont alarmés de l’état de santé précaire de Chadha Haj Mbarek qui souffre de plusieurs maladies, notamment une maladie rénale et d’une perte auditive, qui résulte de la négligence et des traitements infligés en prison.

L’arrestation de Chadha Haj Mbarek s’inscrit dans le cadre d’une campagne systématique lancée par l’actuel pouvoir en Tunisie contre la liberté d’expression, notamment à travers le décret 54, qui a frappé de nombreux journalistes et blogueurs tels que le journaliste Khalifa Al-Qasimi condamné à cinq ans de prison pour avoir publié un article de presse qu’il avait obtenu d’une source sécuritaire ainsi que la chroniqueuse et avocate Sonia Dahmani poursuivie en justice à la suite d’une plainte déposée contre elle par la ministre de la Justice, Leila Jaffel, qui lui reproche ses déclarations sur l’état des prisons tunisiennes.

Le 4 janvier 2024, la Fédération internationale des journalistes a adressé une lettre ouverte au président Kaïs Saied l’appelant à user de tous ses pouvoirs pour faire respecter la Constitution, protéger la liberté de la presse et libérer les journalistes Chadha Haj Mbarek et Khalifa Al-Qasimi ; elle exige qu’il « mette fin à l’arbitraire dans l’adoption de lois et de décrets qui violent les procédures de poursuites à l’encontre des journalistes ».

Le Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT), qui suit la dégradation continue des libertés et les tentatives de faire taire les voix, d’intimider et d’empêcher toute voix critique ou indépendante de s’exprimer à travers le recours au pouvoir judiciaire :

  • tient pour responsable les autorités tunisiennes de la détérioration de l’état de santé de la journaliste. Il leur rappelle leurs obligations internationales et dénonce leur violation de toutes les conventions qui garantissent le droit des détenus de recevoir les soins nécessaires et de ne pas les exposer à la négligence et aux abus.
  • appelle également les autorités tunisiennes à libérer les journalistes Chadha Haj Mbarek, Khalifa Al-Qasimi et tous les prisonniers d’opinion, à abolir le décret 54 qui restreint les libertés et à cesser de recourir à la justice contre des journalistes, des hommes politiques, des blogueurs, des hommes d’affaires et les militants.
  • Par ailleurs, il appelle les organisations de défense des droits de l’Homme et toutes les forces démocratiques du Maghreb et du monde à soutenir les prisonniers d’opinion en Tunisie et à exiger leur libération.
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